On May 26, leading experts from Quebec’s health network discussed how to rethink the health system to create value during a Health Summit session hosted by l’Université de Montréal’s H-pod.
Panellists included Dr. Abdo Shabah, emergency physician and CMA board member, Joanne Castonguay, Health and Welfare Commissioner, Dr. Lucie Opatrny, Assistant Deputy Minister for Quebec’s MSSS Direction des affaires universitaires, médicales, infirmières et pharmaceutiques, and Edith Lambert, a family caregiver with lived experience.
The webinar was hosted by Jean-Louis Denis, Professor of Health Management and Policy at l’École de santé publique de l’Université de Montréal (ESPUM) and co-director of H-pod.
Five key take-aways from the session are to:
When we assess our health system’s performance, we must consider whether the health of the population is improving. And because this is a public system, we must optimize how we use our resources.” — Joanne Castonguay, Health Summit panellist
You can watch the conversation here (French only):
Moderator: Bonsoir à tous. Merci d’être avec nous ce soir. Mon nom est Alexandre Bacon, Innu de la communauté de Mashteuiatsh. Alors je tiens à vous souhaiter la bienvenue à ce troisième webinaire sur la santé organisé par l’Association médicale canadienne. Un webinaire ce soir organisé en collaboration avec le H-pod de l’École de santé publique de l’Université de Montréal.
Alors, ce soir nous allons parler de création de valeur. Nous verrons plus avant avec nos panélistes ce soir de quoi nous parlons plus au juste lorsqu’il est question de création de valeur, c’est-à-dire de quelle façon peut-on faire différemment, faire mieux sans pour autant investir davantage de ressources financières et humaines dans un système de santé dont nous avons tant besoin.
Alors, ce soir nous avons l’honneur de recevoir quatre panélistes de haut niveau. Nous sommes très heureux de vous les présenter. Je vais d’ailleurs vous inviter tout du long de la prochaine heure et demie à formuler vos questions à travers cet ongle dans le bas de votre écran qui s’intitule donc Questions et réponses, Q et R. Alors, n’hésitez pas, si vous le souhaitez tout au long de la présentation à formuler vos questions.
Alors, idéalement, je vais pouvoir toutes les adresser à nos panélistes et nous aurons en toute fin de présentation le professeur Jean-Louis Denis de l’École de santé publique de l’Université de Montréal qui aura le défi de faire une synthèse de tous les propos tenus ce soir. Donc, avant bien sûr de nous lancer dans la présentation des différents panélistes présents avec nous ce soir, j’aimerais quand même rappeler le contexte dans lequel nous tenons ce webinaire. Contexte, bien sûr, où nous avons tous en tête les deux dernières années qui ont constitué un défi majeur, non seulement pour le système de santé mais également pour l’ensemble de l’économie pour de nombreuses dimensions de nos sociétés.
Alors, nous avons pu voir à quel point nous avons dû interrompre beaucoup de nos activités non seulement économiques mais que ç’a impacté l’ensemble de notre fonctionnement sociétal. Déjà fragile, notre système de santé dont nous sommes si fiers s’est quasiment écroulé à certains moments, du moins les gens l’ont porté à bout de bras comme ils le faisaient déjà auparavant. Donc ç’a été vraiment, bien sûr, une épreuve pour l’ensemble du système.
La pandémie a donc exposé au grand jour des problématiques qui existaient d’ores et déjà tout en les exacerbant. Alors nos décideurs, toute la population, ont alors compris le lien intime qui existe entre bien sûr, d’une part, une économie qui est dynamique mais par ailleurs aussi un système de santé stable, robuste et accessible pour l’ensemble de la population.
Donc, il s’agit là d’une fondation pour une société bien sûr en santé, épanouie tout en permettant une économie à l’ensemble de la population de prospérer. Notre système de santé a exposé des failles importantes et des limites, bien sûr, et il devient difficile, voire illusoire de penser que nous pouvons continuer de fonctionner de la même façon en espérant que les choses changent. Donc, c’est bien sûr ce soir on va se poser cette question à savoir de quelle façon peut-on innover, changer nos façons de faire de sorte que nous ne connaissions pas lors d’une éventuelle nouvelle crise une pareille situation.
Et par ailleurs, l’usager, contribuable, patient et bien sûr dans le droit de se demander de quelle façon nous allons apporter ces améliorations nécessaires. Donc, nous vous proposons d’utiliser l’occasion de cette sortie de pandémie pour chercher des solutions, des approches innovantes afin d’améliorer l’ensemble du système. Bref, on va vous inviter à réfléchir de quelle façon nous pouvons apporter des changements de ce qu’on appelle de paradigme, donc de quel modèle de fonctionnement pourrions-nous envisager et potentiellement adopter pour faire en sorte que nous puissions disposer des meilleurs systèmes de soins possible. Et donc créer cette valeur que nous recherchons à l’intérieur de notre système de santé.
Donc système de santé qui bien sûr est une composante essentielle de la société, de l’économie et de la vie quotidienne de chacun. Et pour avoir une société donc en santé, il faut un système qui arrive à répondre à l’ensemble des besoins. Donc ce soir à l’occasion de ce sommet, nous verrons comment il est proposé de repenser ce système et d’envisager de nouvelles pistes de solutions.
Sans plus attendre, je vous propose de vous présenter nos quatre panélistes de ce soir, à commencer par Mme Joanne Castonguay, Commissaire à la santé, au bien-être. Elle informe les autorités gouvernementales et la population sur le contexte, les enjeux et la performance du système de santé et des services sociaux du Québec. Elle conseille aussi les choix qui s’imposent à adapter – pour adapter ce système afin de mieux répondre aux besoins de la population.
Économiste, Mme Castonguay étudie les systèmes de santé depuis de nombreuses années et est l’auteure de plusieurs publications, notamment sur la gouvernance des systèmes de santé et sur le transfert des innovations. Madame Castonguay, merci d’être avec nous ce soir.
Joanne Castonguay: Bonsoir.
Moderator: Notre seconde panéliste, Dre Lucie Opatrny. Elle est sous-ministre adjointe au ministère de la Santé et des Services sociaux et, ce, depuis février 2018 où elle gère la Direction des affaires universitaires, médicales, infirmières et pharmaceutiques. Ses champs d’intérêt sont particulièrement axés sur l’accessibilité aux services de santé et la qualité des soins. Spécialiste en médecine interne, Dre Opatrny détient une maîtrise en gestion de la santé, un diplôme en négociations avancées de l’Université de Harvard, ainsi qu’une maîtrise en épidémiologie et biostatistique de l’Université McGill. Docteure Opatrny, merci également d’être avec nous ce soir.
Lucie Opatrny: Merci.
Moderator: Notre troisième invitée et panéliste ce soir, Mme Édith Lambert, a bien connu le système de santé sous plusieurs angles, que ce soit à titre d’infirmière, mais également comme proche aidante, comme patiente à la suite également d’un accident vasculaire cérébral et d’un accident de voiture traumatique. Elle nous en adressera peut-être quelques mots tout à l’heure. Elle a récupéré une grande partie de son fonctionnement malgré le manque de ressources de réadaptation dans sa région, et utilise son histoire pour aider les autres.
Donc à l’heure actuelle, Édit s’occupe de ses deux parents septuagénaires ainsi que de ses enfants dont l’un présente des symptômes neurologiques atypiques et présentement en investigation. Merci, Madame Lambert, d’être avec nous ce soir. C’est vraiment un grand plaisir de vous accueillir.
Édith Lambert: Je vous remercie.
Moderator: Et enfin quatrième et non le moindre panéliste ce soir, urgentologue, innovateur et spécialiste de la santé publique, Dr Abdo Shabah, a participé à de nombreuses missions humanitaires. Il mène des recherches sur l’utilisation des technologies de l’information dans les situations de catastrophe.
Il détient un doctorat en médecine de l’Université de Montréal, une maîtrise en administration des affaires à McGill, une maîtrise en administration des services de santé, et un certificat en études humanitaires, spécialisé en gestion, crise d’urgence et de catastrophe de l’École de santé publique de l’Université Harvard. Docteur Shabah, merci également infiniment d’être avec nous ce soir pour ces échanges qui se promettent d’être fort intéressants.
Alors, écoutez, pour nous permettre d’avoir un maximum de temps avec nos invités, je vais d’ores et déjà inviter Mme Joanne Castonguay à briser la glace et a lancé les discussions avec une présentation. Madame Castonguay, à vous la parole.
Joanne Castonguay: Merci, Alexandre. Merci beaucoup à l’AMC et merci à H-pod de m’avoir invitée pour faire cette présentation. Je vais vous entretenir ou vous présenter comment le Commissaire à la santé et au bien-être peut contribuer à la création de la valeur, mais en information sur qu’est-ce qu’est la valeur mais surtout en évaluation de la performance du système de santé dans cette création de valeur.
Alors, je vais d’abord vous présenter c’est quoi notre mandat au CSBE, malgré que vous avez déjà dit un mot sur cette question, mais le Commissaire à la santé et au bien-être a comme mission, comme rôle d’analyser la performance du système de santé et d’informer la population et le gouvernement sur les meilleurs moyens d’améliorer cette performance. On a aussi dans notre Loi le mandat d’encourager la participation citoyenne, c’est-à-dire d’informer le gouvernement sur l’opinion citoyenne, si on veut, sur des questions spécifiques.
Donc quand on fait des recommandations s’il peut y avoir des enjeux éthiques, on va faire participer la citoyenne – un forum de citoyens à la conversation. Enfin, on a décidé étant donné justement le fait que ça fait, en fait, longtemps que notre système a besoin de changer la façon dont on fait les choses et qu’il y a eu beaucoup de rapports qui ont été – qui ont fait des rapports d’experts, qui ont fait des recommandations sur les meilleurs moyens d’améliorer la performance du système et puis qu’il y a eu beaucoup de – en fait, pas assez d’action, si on veut, pis il y a beaucoup – c’était généralement lorsqu’on faisait des recommandations qui affectaient ou concernaient les institutions, à ce moment-là ça devenait – ça devenait excessivement difficile.
Donc, on a décidé de contribuer à débloquer les barrières systémiques à l’innovation, au changement, finalement. Et donc d’accroître finalement notre – nos interventions par rapport à la mission première qui nous est confiée. Donc comment on va faire ça? D’abord, tout d’abord en commençant notre mandat, on a remis en question les façons traditionnelles d’évaluer la performance des systèmes de santé. Alors, si vous voyez – ça, c’est la représentation graphique du cadre d’analyse qu’on propose pour analyser la performance des systèmes de santé.
Traditionnellement ce qu’on examine c’est surtout les deux – bon, on va regarder c’est quoi le contexte. On va regarder c’est quoi les éléments qui sont dans la structure et les ressources. Donc, on est censé regarder la gouvernance et la direction. On regarde énormément quels sont les intrants, donc les ressources au système de santé. Quelle est la capacité ou la viabilité du système? Notre capacité à continuer à allouer des ressources au système.
On regarde beaucoup quels sont les quantités, les services qui sont produits. On regarde la qualité, pis quand je dis « regarde », c’est parce qu’on va plutôt regarder si on adopte les meilleures pratiques sur la qualité plutôt que de regarder les résultats liés à la qualité. Et quand on parle de résultats, généralement on va regarder si on a eu un impact sur l’efficacité. Encore là, nos indicateurs d’efficacité sont très limités. On va regarder la réactivité du système. Est-ce qu’il y a eu une réponse à la demande? Est-ce que les gens ont accès au système?
On a le besoin de regarder l’équité et les coûts. Mais on est très critique par rapport aux indicateurs de résultats que nous avons, parce que ce sont tous des indicateurs, ou en grande majorité, qui vont poser un regard sur qu’est-ce qui est fait et non quels sont les résultats. Alors, on se pose pas la question, est-ce qu’on fait la bonne chose, au bon moment, à la bonne personne qui produit les meilleurs résultats escomptés?
Donc on propose de faire évoluer cette façon d’analyser le système de santé, mais d’abord je dois dire que c’est excessivement difficile parce qu’on a très peu de données qui nous permettent de le faire. Donc, on compte influencer pour le faire. Maintenant, qu’est-ce qu’est la valeur? Alors, pourquoi on parle de valeur? C’est-à-dire, quand on regarde la performance d’un système de santé, quand – ou en analyse organisationnelle, performance dit est-ce que vous atteignez les résultats pour laquelle votre organisation existe?
Donc, quand on parle d’un système de santé, on devrait regarder si on améliore la santé de la population. Et puisque c’est un système public, on a un devoir d’utiliser les ressources de la meilleure façon possible. Et c’est exactement ce que la valeur cherche à faire, évaluer est-ce qu’on optimise les résultats atteints par le système de santé compte tenu des ressources dont on dispose? Et pour faire ça, on doit absolument bien comprendre la demande, les besoins et de sorte qu’on puisse arrimer les besoins avec la demande – avec l’offre des services, pardon, pour avoir une offre qui correspond aux besoins de la population.
Maintenant, ça, c’est encore dans le rêve mais disons on est en train de mettre les choses en place pour arriver à cet élément-là. Maintenant, j’ai parlé de gouvernance plus tôt. Je vais vous réexpliquer un peu plus tard comment on veut travailler cette question-là parce qu’à la fois la valeur et la gouvernance ne sont pas des caractéristiques qui sont examinées traditionnellement dans les cadres d’analyse des systèmes. Alors, je vais revenir sur les définitions et pourquoi c’est important. Ben, en fait, ce sont des facteurs excessivement importants si on veut atteindre les résultats souhaités.
Donc, la valeur, qu’est-ce que la valeur? Alors, la façon traditionnelle – les systèmes de santé regardent traditionnellement – ou en fait, il y a deux grandes écoles de pensée. Il y a l’école de pensée de l’Institute of Health Improvement qui est, là, on le connaît davantage sur les quadruple aims et essentiellement on parle d’améliorer l’état de santé, améliorer la réactivité du système, l’utilisation des ressources, et d’améliorer la satisfaction des prestataires.
Il y a une autre définition qui est celle qui sont plus des tenants de l’École – de Michael Porter qui est essentiellement – pas nécessairement à la source ou le fondateur de la valeur, mais disons que c’est lui qui l’a rendue plus communément connue ou utilisée dans le secteur de la santé. Mais essentiellement, c’est deux façons d’exprimer la même chose, bien que les deux écoles puissent penser qu’ils sont deux écoles différentes. Essentiellement, la première va regarder différents facteurs ou stratégies, c’est-à-dire que la réactivité du système et la satisfaction des prestataires sont des stratégies pour améliorer la valeur. Donc, à notre sens au CSBE, ça veut dire exactement la même affaire.
Donc quand on est en train de regarder la valeur, on est en train de regarder les résultats qui sont importants, des résultats de santé et de bien-être qui sont importants pour la population compte tenu des coûts totaux, tous les coûts, toutes les ressources qu’on alloue. Et on doit également s’assurer qu’on préserve les valeurs de la société, c’est-à-dire que si on fait – on atteint nos objectifs, mais qu’on le fait à l’encontre des valeurs de la société, on n’est pas un système de santé publique qui répond aux besoins de la population. Alors, on perd de la valeur à quelque part. Même chose si on le fait sans tenir compte de la valeur nécessaire ou importante pour les prestataires. Et les prestataires étant les travailleurs et les organisations.
La gouvernance. Pourquoi la gouvernance est importante? Là, je viens de sauter. Je m’excuse. Alors, la gouvernance, lorsqu’on a fait une évaluation de ce que voulait dire la gouvernance, on s’est rendu compte d’abord qu’il y avait autant de définitions qu’il y avait de personnes qui s’y intéressaient. Ensuite, les cadres d’analyse de la gouvernance étaient très peu fréquents. Donc on s’en est donné un. On en a proposé un et c’est ce qu’on a utilisé dans notre premier grand mandat.
Donc, si on regarde – on a adopté une définition aussi pis, en fait, la gouvernance ça réfère à l’ensemble des institutions qu’elles soient formelles ou informelles. Donc tous les mécanismes qu’on met en place pour favoriser l’atteinte de nos objectifs. Et puisqu’il s’agit ici d’un système public, ça inclut la réglementation, les lois, etc. Et le rôle de la gouvernance, c’est de traduire la volonté de la société en objectif, d’établir les politiques, les orientations et les stratégies afin d’atteindre les résultats, et de mieux soutenir. En fait, on est en train ici d’exprimer quel est le rôle du Ministère dans l’atteinte des objectifs du système de santé? Ou en tout cas, un des rôles importants.
Comment on va apprécier la gouvernance? Alors, on s’est donné un cadre d’analyse, la gouvernance, pour apprécier l’alignement de l’ensemble des politiques, des stratégies, des mécanismes incitatifs, etc. Est-ce qu’ils sont bien alignés avec l’objectif d’atteindre les meilleurs résultats de santé compte tenu des ressources?
Alors, on a analysé chacun de ces éléments-là dans le contexte de notre mandat, donc la façon dont on finance les CHSLD, la façon dont on donne les objectifs, la façon dont on mesure l’atteinte des résultats qu’on évalue la qualité. Est-ce que c’est en lien avec la valeur ou non? Est-ce qu’on donne des directives qui sont conséquentes ou non? Et donc, on s’est donné un cadre d’analyse qui nous permettait finalement de faire le contour des leviers et donc les différents leviers sont le plan stratégique et sa mise en œuvre.
Donc ça inclut les orientations ou comment – quelles sortes d’évaluations qu’on fait de l’environnement et comme compréhension des enjeux, les stratégies qu’on met en place, le type de leadership qui est exercé. Est-ce que ces moyens-là mis en place sont conséquents ou cohérents avec l’objectif d’amélioration de la valeur? Même chose pour les mécanismes de contrôle qui sont l’évaluation de la qualité, par exemple. Les mécanismes d’incitation, toute la rémunération, comment on compense les hôpitaux pour les offres – les services qu’ils offrent. Est-ce que c’est en lien avec la valeur? Ou c’est en lien avec la multiplication des activités?
On peut se poser la question. La mesure des résultats à la gestion des risques, est-ce qu’elle est faite? Est-ce qu’on le suit? Est-ce que l’évaluation, les processus d’évaluation, les données dont on dispose, est-ce qu’elles nous permettent de porter un regard sur la performance ou la valeur, et soutiennent la prise de décisions?
Donc, on a obtenu un premier mandat et je vais pas passer à travers ça parce que je dispose pas le temps, mais je veux juste montrer les différentes – excusez-moi, là, je vais passer plus vite. Mais essentiellement pour mentionner que ce qu’on a observé c’était les causes fondamentales de notre échec pendant la première vague, ou à gérer ou à bien gérer, étaient essentiellement dues au fait que le Ministère ne valorise pas son rôle de la gouvernance qui est pourtant essentiel.
En fait, l’attention du Ministère est portée sur les opérations du système et donc il ne mobilise pas les leviers et les ressources de façon à aller chercher, maximiser la gouvernance. Maintenant, on a proposé des orientations plutôt que de proposer des recommandations. Un ensemble d’orientations qui permettraient de favoriser la valeur, mais ça exige des changements institutionnels qui sont excessivement importants.
Alors comment on souhaite au Québec – excusez-moi, au CSBE soutenir cette amélioration-là, ça va être en trouvant les blocages et les freins qui nuisent à l’adoption des innovations, qui nuisent au changement, en identifiant les accélérateurs. Alors, allons voir comment les autres on réussi à débloquer, mais surtout en soutenant la collaboration, en permettant aux différents acteurs de codévelopper des solutions, en tenant compte des enjeux de tous, mais en travaillant vers notre objectif qui est commun qui est d’améliorer la valeur qu’on obtient en temps de population à partir de notre système de santé.
Et donc les questions auxquelles on répond. Trois catégories de capacité à développer pour y arriver. Alors à la fois au sein du CSBE mais aussi au sein de l’ensemble du système, la gouvernance en santé, l’innovation dans les politiques publiques et surtout la mesure de la valeur. Comme je disais, on n’a pas les bonnes données. On doit s’entendre sur les données et comment les cumuler. Alors, je vous remercie beaucoup.
Moderator: Merci à vous. C’était tout un défi que de faire un tour aussi rapide des enjeux. Et ben, j’en profiterais, si vous permettez, pour inviter immédiatement Dre Opatrny à prendre la parole pour la seconde présentation. Après quoi, je vais inviter nos deux autres panélistes à formuler un peu à brûle-pourpoint leurs impressions de manière synthétique sur ce qui aura été avancé jusqu’ici. Docteure Opatrny, à vous la parole.
Lucie Opatrny: Merci beaucoup. Et merci beaucoup à AMC de l’invitation ce soir. Alors, je vais continuer, je pense, à vrai dire sur pas mal le même sujet, de vous présenter quelques prismes et angles sous lesquels, moi, je regarde la valeur en santé, et de partager avec vous ce soir quelques exemples québécois que je trouve regarde et démontre la création de valeur.
Alors, comme Mme Castonguay a aussi dit, pour moi ça c’est en termes graphiques le modèle de IHI (sic), de quadruple aims où on regarde comment une création de valeur doit toucher plus ou moins, mais vraiment regarder tous ces éléments-là. Alors, de regarder les résultats patients, de regarder comment ceci peut améliorer l’expérience patient, de regarder comment on peut diminuer les coûts. Et finalement, le quatrième qui a été rajouté plus récemment, c’est dans un contexte de bien-être du clinicien aussi auquel ç’a rajouté des fois un cinquième qui est l’équité. Mais ça, c’est quelque chose que pour nous ç’a toujours été pas mal intégré.
Et l’autre en lien avec ça, en termes de création de valeur, c’est d’avoir un concept qu’on devrait jamais être statique. On devrait toujours se demander n’importe où où on est, comment est-ce qu’on peut s’améliorer dans un processus d’amélioration continu? Alors d’observer où est-ce qu’on est, de mettre un plan, de le mettre en application, de regarder par la suite est-ce que le plan de mesurer – pis ça, c’est clé vraiment – de mesurer est-ce que ce qu’on a mis en application a donné les résultats? Si oui, mais parfait. Continuez sur le même angle ou le prochain. Et sinon, pourquoi non. Alors, reculons pis peut-être essayons d’autre chose. Mais de toujours avancer vers une amélioration qui nécessite vraiment une mesure et une réflexion.
L’autre, c’est pour moi la standardisation. Et là, j’utilise l’exemple d’un repas de McDonald pis on peut ou peut pas dire que c’est la qualité, OK, mais on peut dire que peu importe si on est à Montréal, à Mumbai ou à Madrid, là, ça va goûter pareil. Et si on pense que c’est bon ou non, on sait que la qualité va être pareille parce que leurs processus sont hyper standardisés. Et ceci dit, mes enfants me disent, il y a quand même une variation du menu local. En France, c’est des macarons. En Angleterre, il y a des scones. Mais à la base, c’est standard.
Pis je pense en médecine, il faudrait voir comment la base 80-20 standardiser ce qui peut être standardisé pour par la suite la variation qu’il faut amener, laisser nos cerveaux, laisser le temps à faire cette personnalisation-là pour ceux qui ont besoin d’être personnalisés.
Alors là, si on regarde les soins, pour moi il y a un continuum. Il y a la vaccination que pour moi est quelque chose qui est à un extrême, qui est quelque chose une procédure simple qu’on fait à très haut volume pis c’est assez facile de standardiser. Et parce que c’est facile à standardiser et c’est à haut volume, on peut vraiment l’administrer pis l’avoir partout. À l’autre extrême, il y a peut-être d’autres exemples aussi, mais pour moi c’est la neurochirurgie où c’est une procédure qui est très complexe et ça prend une équipe hautement spécialisée et il y a très peu de volume.
Et c’est pour ça qu’il faut le concentrer dans quelques sites au Québec, parce que la chirurgienne il faut qu’elle voie un certain nombre de cas pis entourée par l’équipe spécialisée pour être sûre que la qualité est là. Les complications sont bons (sic). Entre ça, ben, c’est entre la vaccination et la neurochirurgie, et on peut penser à l’obstétrique, à la cancérologie, à la cardiologie interventionnelle où c’est – il faut regarder et balancer à quel point ça peut être standardisé tout en gardant un certain volume pour s’assurer qu’on a accès à une qualité de l’aide qui nous amène toujours à un équilibre.
Parce qu’il y a toujours un équilibre à aller chercher entre un accès en proximité parce qu’on veut aller chercher nos soins près de chez nous, mais de s’assurer qu’il y a une certaine qualité et de diminution de complications. Il faut quand même avoir un certain volume de procédures pour avoir un seuil et pour atteindre cette qualité et sécurité. Alors, c’est pour ça que par exemple il y a certains cancers qui sont traités aussi juste à quelques endroits pour être sûr que ce qui – les résultats qui sont obtenus sont de haute qualité et il y a une certaine standardisation avec le volume.
Et ça, ça joue beaucoup aussi sur notre territoire qui est très vaste et des fois il faut toujours regarder la balance entre un accès de proximité avec l’assurance de qualité. Alors maintenant, je me tourne – alors ça, c’est quelques exemples de prisme. Mais là, les exemples québécois, en particulier, et j’ai choisi quelques-uns que pour moi va chercher différents éléments du modèle de quadruple aims.
Le premier que j’utilise, c’est celui des médicaments biosimilaires sur lequel on a travaillé. Alors ici, je vous montre – ça, c’est les coûts pour les médicaments, pas juste les biosimilaires, le coût total des médicaments au Québec. Et on voit que ça monte en flèche depuis quelques années. Alors, c’était pas mal stable. Ça monte en flèche. Et ça, c’est dû à l’arrivée des médicaments biologiques qui sont excellents, qui marchent très bien en cancérologie puis immunomodulation, par exemple, en gastroentérologie ou chromatologie. Mais c’est pas soutenable d’avoir cette montée-là.
Alors, qu’est-ce qu’on peut faire? On a suivi les autres pays. Il y a d’autres pays européens. Il y a d’autres provinces qui sont allées avant nous de voir est-ce qu’on peut réduire le coût? Et est-ce qu’on peut le faire de façon qui est efficace et sécurité? Et la réponse est oui qu’on peut remplacer quelques médicaments originaux par des médicaments biosimilaires qui ont fait preuve des études pour l’efficacité et de sécurité. Et qui sont beaucoup moins dispendieux.
Alors nous avons travaillé depuis un an avec plusieurs parties prenantes, des patients partenaires, l’INESSS, les compagnies pharmaceutiques, les médecins, les soignants pour – avec un objectif d’aller de 5 % d’utilisation des médicaments biosimilaires à 50 % en trois ans. Et ceci pourquoi? Parce que comme ça, on peut traiter le même nombre de patients pour beaucoup moins d’argent qui dégage des sommes pour faire quoi? Pour aller chercher d’autres médicaments novateurs qui sortent sur le marché pour être capables de traiter plus de patients pour la même somme.
Alors pour moi, ça, c’est un exemple de création de valeur. Et je vais sauter ça juste pour dire que ça fonctionne. L’année passée, c’est vraiment à l’automne que ç’a été mis en place avec 14 millions qui ont été une diminution de 14 millions. Mais cette année, une projection de 100 millions de diminution de coûts avec le transfert vers les médicaments biosimilaires.
Alors, un deuxième pis c’était finalement fait main dans la main avec les soignants pis avec les patients. Et évidemment, il y a des exceptions pour ceux qui ne peuvent pas faire le transfert de façon sécuritaire.
Deuxième exemple. J’utilise complètement autre chose. C’est une intervention coronarienne percutanée pis je pense que beaucoup de demandes à AMC sont des médecins, mais juste au cas où pour les autres qui le sont pas. Alors je rappelle que quand on a une artère qui est bloquée, mais une procédure percutanée pour aller ouvrir soit avec un stent ou non l’artère. Mais ça, c’est encore une chose qui est hautement spécialisée. Et est-ce que c’est comme le McDonald? Est-ce que peu importe où on va, les résultats sont pareils?
Et la réponse à ça c’est non. C’est pas le cas. Alors, il faut regarder et mesurer. Alors, ce qu’on voit ici, c’est un graphique de montrer pancanadien de façon brute quels sont les résultats en termes de mortalité suite à un choc cardiovasculaire – choc cardiaque et on voit qu’en brut, Canada en rouge, et la mortalité est moins qu’au Québec en bleu. Et en bleu foncé, on voit qu’il y a une mortalité qui est plus élevée. Mais ça, c’est brut. Alors notre population est pas pareille parce qu’on est plus vieux, plus âgés, avec plus de comorbidité. Alors, on voit l’importance qu’on peut pas se fier sur des chiffres bruts. Il faut faire des ajustements pour être sûr qu’on compare les mêmes populations.
Alors il faut comparer les mêmes âges avec les mêmes comorbidités. Alors quand on fait ça, mais les écarts sont beaucoup moindres, mais les écarts continuent. Alors maintenant, c’est que les résultats québécois qu’on voit. Alors après qu’on ajuste pour toutes sortes comorbidités et âges, etc., ce qu’on voit c’est qu’il y avait des outlyers. Il y avait quelques endroits au Québec qui avaient des résultats qui étaient pas aussi bons que les autres.
Alors – des différences sont pas si grandes que ça. C’est pas des différences qui seraient – qui frappent l’œil sans mesurer de façon standard. Alors, on les a rencontrées pis c’était très intéressant de voir l’approche. Alors il y a quelques centres qui sont venus pis ils disent, oui. Alors, on a vu ça pis on a commencé à analyser nos données puis on a réfléchi pis on a vu telle, telle affaire, pis on a décidé de faire tel, tel, tel ajustement. Et c’est exactement le cycle de réflexion de mettre en application et de voir comment on améliore.
Et il y a d’autres qui ont dit, ben, vous avez les mauvaises données. C’est pas vrai. C’est pas – alors, il y a une résistance des fois à accepter les données qu’on démontre. Et ça, c’est tout à fait naturel. C’est tout à fait normal qu’au début on se dit, mais ça se peut pas. Je fais tout bien. Je suis expert. Pourquoi? Alors, c’est vraiment un changement de pensée qu’il faut accompagner de façon de dire mais – et de réaliser et mettre en place des éléments pour par la suite s’améliorer et venir dans les moyennes.
Alors ça, c’est un autre exemple pour moi où de mesurer des fois ça nous soulève des éléments de qualité auxquels on n’était pas au courant qui nous laissent par la suite faire des changements pour s’améliorer. Mais ça veut pas dire que ceux qui sont en dessous de la moyenne peuvent pas non plus continuer à s’améliorer quand on regarde nos données.
Alors ça, encore une fois, c’est dans la vision d’amélioration continue. Alors pour moi, quels sont les différents éléments qui sont importants? C’est de se mesurer et de comparer les clés (sic), parce que ça nous permet d’identifier et de travailler et suivre les écarts. Mais c’est vraiment un changement de paradigme parce que c’est pas des données vraiment qu’au Québec en ce moment on partage nécessairement comme fait d’autres, par exemple Ontario, comme font d’autres pays, mais on s’en vient.
Je pense qu’il me reste pas beaucoup de temps alors je vais sauter le coût par parcours de soins où vraiment on va changer la façon qu’on finance le système d’un budget historique vers un parcours – un coût par parcours de soins. On peut peut-être regarder ça à un autre temps pour encore une fois mettre la valeur pour – au système pour peut-être dire que pour moi le plan santé qui a été récemment déposé va chercher ces éléments-là. Il y a vraiment un changement de paradigme que, moi, je vois.
Vous avez vu récemment qu’on commence à publier des tableaux de bord qui ont pas été publiés avant pour partager ces éléments-là pour vraiment de mesurer et agir sur ce qu’on voit comme indicateurs. Et je trouve que c’est un rattrapage qui est important à faire. Je pense qu’on devrait dans le futur le pousser encore plus loin pour, comme a dit Mme Castonguay, aussi regarder pas que les processus mais des résultats de qualité. Et tranquillement ça va prendre un changement de culture dans le milieu de santé parce que c’est pas quelque chose auquel on est habitué mais je suis certaine qu’on y arrivera.
Moderator: Merci infiniment. Alors des enjeux de fond que vous avez soulevés sur la nécessité d’aller vraiment inciter le système à entrer dans une sorte d’adaptation de transformation à plusieurs égards dans plein de dimensions. Mais avant d’aller plus loin, là, dans ces questions que je voulais mentionner tout à l’heure, j’aimerais inviter nos deux autres panélistes à prononcer un peu à brûle-pourpoint, à chaud comme on dit, vos impressions ou des réflexions que vous soulèvent les différentes – les deux interventions qui vous ont précédées. À commencer par Mme Lambert en deux minutes.
Édith Lambert: Parfait. Ben, en fait, je suis contente de voir qu’on va regarder les résultats ou même les objectifs de façon différente. Bon, ayant été dans le milieu de soins pendant 15 ans, on a souvent pas été écoutées, nous, en tant qu’infirmières. On faisant des demandes. On mentionnait des situations pis c’était juste comme balayé. Je pense qu’avec la nouvelle vision, ça pourra plus être balayé pis les intervenants vont pouvoir être mieux entendus.
Pis je pense que c’est la base. C’est eux qui savent ce qui fonctionne pas pis qu’est-ce que justement quand vous dites que, ah, j’ai fait tel changement pis il y a une réussite. Ben, c’est les intervenants qui ont fait ces changements-là. Donc c’est eux qui sont en mesure de dire, oui, ça fonctionne, non, ça fonctionne pas. Évidemment, il faut faire tomber la résistance. Ça aussi c’est pas facile mais je pense que justement en travaillant en équipe pis en étant plus transparents, ça aussi je suis contente de voir.
T’sais, en publiant vos résultats et tout, ben, ça donne de l’éducation pis les gens aussi vont mieux comprendre un peu pourquoi mettons les délais sont longs ou telle chose se fait pas parce qu’on voit, ben, on a tenté ça. On a eu tels résultats mais on va amener des changements pis on va pouvoir suivre le changement. Pis ça, je pense que ça va calmer aussi la population au niveau de toute la colère qu’ils ont parce qu’on a l’impression que le système est brisé pis qu’on n’a pas – on n’a pas de soins, là, comme on devrait avoir. Donc, je suis contente de ce que j’entends, là.
Moderator: Merci. Merci beaucoup, Madame Lambert. Docteur Shabah.
Abdo Shabah: Je trouve que c’est extrêmement intéressant la présentation d’une perspective un peu systémique et systématique de l’approche un peu de l’analyse dans le système de santé à différents niveaux. Je pense qu’il y a des défis qui sont là par rapport à comment est-ce qu’on – la prestation de soins au niveau local, au niveau régional et au niveau, on va dire provincial, et quand on compare au niveau national et ailleurs.
On n’a pas les mêmes chiffres qu’ailleurs. On a un territoire très vaste. On a aussi une prestation de soins qui est variable entre les régions. Demeunier (sic) en Gaspésie ne se traite pas de la même manière même si on donne les mêmes antibiotiques, mais l’épisode de soins ou la durée des fois la réalité régionale vient nous rattraper pour dire, ben, il y a certaines interventions qui sont données différemment. Et c’est de la personnalisation. C’est vraiment de l’adaptation en fonction de la communauté ou des besoins des patients localement.
Donc, je trouve ça très intéressant d’amener de la standardisation et de la personnalisation en même temps par rapport aux soins et de regarder ça dans une perspective très large, systémique et d’une manière beaucoup plus locale également.
Moderator: Merci beaucoup, docteur Shaba. Je prends également soin de vous rappeler que si vous avez des questions à formuler afin de les adresser donc à nos panélistes, n’hésitez surtout pas à les écrire. Comme je vous le mentionnais tout à l’heure dans la section Q et R, Q&A pour formuler ces questions. Alors nous en avons d’ores et déjà une, alors.
Et la question est la suivante. « Le système de santé est fondé sur l’assurance-maladie. Dans le requestionnement de ce système, doit-on à ce niveau changer de paradigme, soit assurer la santé à proprement dit? » Alors je sais pas si l’un ou l’autre d’entre vous a des idées à formuler par rapport à cet enjeu de fond qui revient de manière régulière depuis plusieurs années sur l’assurance. Je suppose que ça soulève aussi l’enjeu de la privatisation des soins, bien sûr. Est-ce que – Madame Castonguay.
Joanne Castonguay: Oui. En fait – ben, en fait, moi, ça m’interpelle à deux niveaux. Je dirais que – ben, en fait, je dirais oui on est – le système est fondé sur l’assurance-maladie, mais en fait il est fondé sur les soins et les services de santé. Alors, que si on regardait de façon différente pis qu’on mettait davantage – et c’est une de nos recommandations dans le cas de notre mandat spécial qui est de donner davantage de place à la santé publique, davantage prévenir la maladie.
Et donc de partir avec ce paradigme-là. Et quand on parle de parcours de soins, Dre Opatrny parlait de coûts par parcours de soins. Ben, le parcours devrait aller aussi loin que de considérer la prévention. On n’est pas rendu là dans la façon de faire, dans les moyens de financer. En fait, je crois – je l’ai jamais vu même dans les systèmes de santé en les observant, mais on peut toujours prendre le concept et investir et placer la santé publique au cœur des stratégies pour améliorer la performance du système.
Moderator: Merci. Et si je me souviens bien et si ma mémoire est bonne, dans la mise en place du système d’assurance-maladie, la carte d’assurance-maladie est également un M. Castonguay qui était là. On parlait de la castonguette au sujet de cette carte d’assurance-maladie que l’on passait dans les systèmes de soins. Très bien. Alors, je vous remercie. On aurait une question qui s’adresse cette fois-ci au Dre Lucie Opatrny.
Elle se formule comme suit : « Comment pouvons-nous changer les paradigmes et rendre plus fluide et agile la présente gouvernance pour accroître l’accès aux services de première ligne de qualité en mettant à contribution le bon professionnel au bon moment pour répondre aux besoins du patient. Donc agir là où ça compte. Par exemple, les physiothérapeutes occupent un champ vaste d’exercice en neuromusculosquelettique et cardiorespiratoire et ont accès direct depuis maintenant 30 ans – et ont un accès direct depuis maintenant 30 ans. Alors comment voyez-vous les prochaines étapes pour nous permettre de vous aider tant en organisation du travail optimisée qu’en valorisation de cette profession qu’est la physiothérapie au bénéfice des patients, des listes d’attente postopératoire, du désengorgement des urgences? » Alors Madame Opatrny, tout un menu.
Lucie Opatrny: Je pense qu’on est tous d’accord qu’il faut vraiment changer le modèle de la première ligne d’aller à j’ai besoin d’un médecin de famille qui par la suite qui est le goulot d’étranglement qui va par la suite nous diriger vers un service plus approprié si c’est physiothérapeute comme mentionné dans la question ou si c’est un pharmacien ou un travail social. Plus de dire, quel est le problème que j’ai qui doit être adressé par le bon professionnel? Alors vraiment de changer le paradigme et voir comment aiguiller l’individu avec le professionnel qui est plus apte à adresser la problématique dans le temps opportun.
Et c’est vraiment ça qu’on est en train de travailler avec, par exemple, le guichet d’accès en première ligne qui est vraiment une transition vers un système plus de capitation de voir comment est-ce que – et on parle aux États-Unis par exemple d’un patient home, de voir comment quelqu’un peut être entouré par des services auxquels il a besoin. Alors ceci, c’est sûr que ça prend une réorganisation mais c’est exactement vers ça qu’on est en train de travailler.
Alors maintenant, il y a beaucoup de sommes qui ont été données pour essayer de structurer ça. On regarde aussi des éléments de TI pour nous aider. On est en train de travailler avec plein de différents professionnels de santé pour faire exactement ça, de voir plus comment arrimer les besoins avec le bon professionnel. C’est vraiment là-dessus pis c’est vraiment là-dessus qu’on veut travailler d’ici activement les trois prochaines années.
Moderator: Merci beaucoup, Docteure Opartny. J’ai vu brièvement une question tout à l’heure qui m’interpellait aussi qui est le défi de la mise en œuvre. Alors, vous avez soulevé, si on veut, cette réalité pis elle est organisationnelle. Elle est pas propre à ici mais il y a toujours une certaine résistance au changement. On a parlé du changement de culture dans les organisations. Et il y a une notion qui a été soulevée tout à l’heure qui m’a interpellé qui est celle des accélérateurs d’innovation. Alors, comment fait-on pour amener les gens à sortir de cette stagnation, de cette force d’inertie des fois.
Vous avez parlé tout à l’heure des – justement. Comment fait-on pour rester en mouvement pour être dans cet esprit du changement, d’adaptabilité. Alors, ce serait ma question qui va reprendre – qui reprend une des questions qui avait été posée. Alors, dans le défi de la mise en œuvre de l’amélioration du système, où sont ces pistes d’accélération qui nous permettent d’adapter davantage le système?
Lucie Opatrny: C’est pour moi aussi, j’imagine. Pour moi, ça serait un mariage entre – que le Ministère fasse des objectifs clairs, mais qu’il donne des outils pour que le réseau le mette en place. Et alors quand on a des objectifs et que le réseau a des moyens. Quand je dis des moyens en ressources humaines, des moyens en termes d’outils technologiques, en termes de stratégies, de partage des meilleures pratiques parce que c’est vraiment le terrain qui aussi va faire en sorte – c’est là où les solutions se trouvent.
Alors, c’est ce mariage-là que pour moi est important, d’avoir les orientations qui sont données mais par la suite c’est vraiment le terrain avec tous les outils qui sont disponibles de le mettre en application. C’est assez simpliste mais en même temps je pense que ça revient un petit peu à ce que vous avez dit aussi.
Joanne Castonguay: Oui, tout à fait. Et quand je parlais du rôle du Ministère. Mais j’ajouterais à ça que souvent on va avoir des projets de démonstration qui vont dire on va essayer de voir si ça marche en organisant les choses autrement. Et qu’à partir du moment où on retire, t’sais, que c’est plus un projet de démonstration pis qu’il y a moins de soutien, souvent les projets tombent.
Et la raison pour laquelle ces projets-là vont tomber, c’est que les institutions donc les mécanismes de rémunération, la façon de suivre les données, ça peut – ben, les mécanismes de rémunération surtout dans l’exemple que vous donniez qui concerne la première ligne pis l’intégration des nouveaux membres d’une équipe, ben, c’est exactement ce que vous faites ou ce que le Ministère fait quand il est en négociation pour orienter le financement de la première ligne vers une équipe de soins plutôt que vers le médecin.
Et par contre, ça confronte la culture. Ça confronte les institutions parce que les médecins n’ont jamais été financés comme ça. Les infirmières n’ont pas été financées comme ça. Les infirmières travaillent pour le réseau. Alors, il y a toutes sortes de résistances qui sont pas nécessairement identifiées ou connues à l’avance. Et l’idée de faire travailler – alors quand je parlais de codévelopper les solutions pour développer des institutions plus agiles, c’est exactement de ça que je parlais.
Et quand on regarde les mécanismes d’innovation pour des innovations technologiques en ingénierie, etc., eux, ils sont habitués de faire du codéveloppement. Ils appellent ça – bon, il y a toutes sortes de termes, le design thinking, les living lams. Essentiellement ce qu’ils font c’est du codéveloppement. Et il y a des connaissances qui commencent à se développer sur le codéveloppement pour les politiques publiques.
C’est pas encore quelque chose qui est répandu ou qu’on attend, mais il y a une littérature qui commence à se développer et ça fait partie, là, des choses que, nous, on veut investiguer pour informer davantage sur faire des recommandations sur comment améliorer la valeur.
Moderator: Hé bien justement, ça me permet peut-être de faire le pont vers notre deuxième volet de la soirée, parce qu’il apparaît évident que dans l’approche d’intelligence collective qu’on soulève, sans la nommer depuis tout à l’heure, c’est-à-dire en interpellant dans l’identification des problèmes et des solutions à mettre en place l’ensemble des acteurs qui sont partie prenante de nos sociétés à la fois donc les décideurs dans toutes les étapes de gouvernance, mais aussi les prestataires, les usagers.
Et c’est dans cette logique que nous avons l’honneur ce soir de recevoir Mme Édit Lambert qui elle a été à la fois donc du côté – dans le système à titre d’infirmière. Mais c’est ce soir non pas à titre d’infirmière qu’elle est invitée, mais pour son expérience dans le système de santé. Et je l’inviterais pour les prochaines minutes justement à nous partager brièvement quel a été votre parcours au cours des dernières années avec le système de santé. Madame Lambert, merci d’être avec nous.
Édith Lambert: Ben, merci à vous. Donc, dans le fond, ben c’est ça. J’ai été infirmière pendant 15 ans. Donc j’étais – je me suis promenée beaucoup. J’étais équipe volante. J’ai quand même vu bien des choses. Ensuite de ça, j’ai eu un accident de voiture qui m’a causé un AVC et suite à ça malheureusement j’ai dû faire le deuil de ma profession et me réorienter. J’ai quand même eu des enjeux suite à mon AVC, bon, au retour à la maison. Je vais vous en parler un petit peu plus tard.
Pis présentement, dans le fond, c’est ça, je suis dans une situation difficile avec mon garçon qui a des symptômes neuroatypiques et qui sont soudains. Il s’est levé comme ça un matin et j’ai beaucoup de difficultés à avoir des soins pis des suivis pour lui. Donc, au niveau des premières lignes justement quand je vous écoute, je suis comme, OK, super, parce que justement d’avoir quelqu’un présentement autre qu’un médecin, ce serait très apprécié.
On a l’impression d’être en chute libre présentement pis on se croise les doigts que le parachute va s’ouvrir. Et c’est très désagréable comme sensation. C’est pas le parcours que j’ai eu. Dans le fond, t’sais, la difficulté d’avoir des soins c’est pas basé sur une seule personne ou un seul intervenant. Ç’a vraiment été au niveau du système. Je vous donne un exemple. Avec mon AVC quand je suis retournée à la maison, j’ai été six semaines en réadaptation interne. Ça allait bien. C’est l’fun. T’es entouré. C’est magique. Tu vas chez vous une fin de semaine, tu reviens, yé! Quand t’es rendu chez vous 24 heures sur 24 dans la routine avec des enfants toute seule, pas de ressources, c’est autre chose.
J’avais dans le fond – ben c’est une perte d’autonomie. J’ai paralysé du côté gauche au complet. Donc oui j’ai récupéré pis ils nous retournent pas à la maison quand on n’est pas prêt. Mais ça reste qu’on n’est pas à 100 % quand on revient à la maison. Et bon, il y a des programmes d’aide pour les personnes âgées en perte d’autonomie et ç’a l’air qu’il y a des programmes d’aide pour la petite enfance quand il y a de la perte d’autonomie.
Entre cinq ans et 65 ans, il y a rien. Moi, j’ai eu mon AVC à 34 ans. Donc je rentrais dans aucun programme. Donc si je voulais avoir de l’aide à la maison justement pour que ce soit le ménage, que ce soit pour la routine avec les enfants, que ce soit d’aller faire l’épicerie. Tout ça, je devais payer pour avoir de l’aide, mais évidemment je suis en arrêt de travail. Oui, il y a des différents programmes pour nous aider dans ça. Malheureusement, moi, ma condition, bon, il y a eu des enjeux avec la SAQ (sic), là. Donc j’ai fini par aller sur l’aide sociale.
Donc on s’entendra qu’avec l’aide sociale j’avais pas les moyens de payer pour avoir de l’aide à la maison. C’était temporaire heureusement. Mais c’est quand même une réalité que j’ai eue. J’avais aucune ressource pour m’aider comme ça. Donc, il faut voir, t’sais, on parle de standardiser, oui, mais justement à cause de critères précis, moi, j’ai pas eu d’aide quand je suis revenue à la maison, parce qu’il fallait que j’aille 65 ans et plus. Il fallait tel, tel, tel critère.
Pis ça, je trouve que c’est – je me suis sentie un peu comme abandonnée pis pas importante, t’sais, parce que je veux dire dans le fond ma perte d’autonomie était comme banalisée par rapport à une personne âgée. Pis ça, ça devrait pas parce qu’on devrait tous avoir, on va dire, la même qualité de vie. Ce serait merveilleux. C’est un peu utopique mais une base du moins, pis avoir de l’aide pour justement regagner notre autonomie, ben, ça devrait pas devoir être une dépense personnelle.
Pis encore plus quand les autres en ont droit pis que toi tu l’as pas. Au niveau plus récemment parce que ça, bon, ça fait quand même huit ans pour l’AVC, là. Il y a des choses qui ont changé, du moins j’espère.
Plus récemment avec mon garçon, ben, l’accès aux soins est difficile. On se présente à l’urgence. C’est long. On comprend le processus pis, bon, les médecins sont débordés. J’ai vu – j’ai dû consulter trois fois parce que mon garçon se détériorait. J’ai toujours la même réponse, je peux pas rien faire parce que j’ai pas de neurologue qui peut le voir. Dans cette situation-là, c’est pas tant les délais d’attente qui sont angoissants ou qui nous perturbent. C’est vraiment, c’est l’incertitude, je vais-tu avoir des soins? Je vais-tu avoir quelqu’un? Pis moi, je suis là pis je regarde mon fils se détériorer, pis je peux pas rien faire.
C’est l’impuissance aussi qui est là. Pis quand on est un proche aidant et qu’on parle, ben, il faut être écouté. Moi, je suis avec 24 heures sur 24. Donc je vais amener des données, des faits que vous voyez pas quand on est avec vous dans une évaluation quelconque ou peu importe l’intervenant. Donc, c’est important que – c’est pas parce que c’est pas mon fils qui parle que c’est pas vrai. Pis ça, c’est un sentiment qu’on a vécu tous les deux de ne pas être écoutés, entendus.
Mikael (ph) a de la difficulté à s’exprimer présentement. Il cherche ses mots. Il dit pas les bons mots. Il y a une lenteur au niveau de l’assimilation de l’information. Donc, expliquer au médecin ce qui se passe quand il regarde pis dis-moi ce qui se passe pis qui enchaîne question après question après question, il est incapable de le faire. Et on lui laisse pas le temps parce qu’il n’a même pas fini sa première phrase qu’on lui pose une autre question.
Donc dans ce contexte-là, on respire, et on se dit, OK, on va aller voir ailleurs pis on essaie. T’sais, j’ai peut-être abusé mais j’ai consulté dans trois hôpitaux différents pour essayer d’avoir de l’aide. On vient désemparé pis quand le dernier médecin que j’ai vu à l’urgence, il était lui-même désemparé quand il m’a dit, je vous remets le papier de consultation pour un neurologue. Vous devez vous trouver un neurologue parce qu’on peut pas le voir avant un an, mais il doit être évalué rapidement.
Donc, je fais quoi, moi, avec ça? Donc, j’ai dû par moi-même – évidemment, maman m’a aidée. Une chance que je l’avais, mais j’ai dû appeler dans 25 hôpitaux sans jamais être capable de parler à qui que ce soit, parce que c’est le message vocal qui dit « envoyez votre requête à tel numéro de fax ». En 2022, on peut-tu envoyer nos requêtes en courriel? Déjà trouver un fax ç’a été un défi en soi. J’ai faxé des requêtes mais est-ce qu’elle a été reçue?
Est-ce qu’il y a quelqu’un qui va prendre la requête, qui va la lire pour vrai pis qui va voir c’est coché urgent pis qui va vraiment nous traiter de façon urgente ou pas? C’est quoi urgent? C’est vaste. Ma version d’urgence c’est tout de suite. La version du système semble être autre chose, parce que c’est depuis le 16 mars que mon garçon va pas bien pis j’ai toujours pas de piste de solution.
Donc, c’est tout ça mis ensemble qui fait que – justement c’est ça, on est désemparés. On devient, ben, en colère pis c’est pas toujours dirigé vers les bonnes personnes. On essaie de faire attention mais, bon. J’ai dû demander l’aide de mon député pour qu’on arrête de canceller mes rendez-vous qu’on me donnait pour une évaluation. Pis quand j’ai réussi à avoir un neurologue, elle a focussé sur des choses qui étaient pas dans la condition existante.
Donc elle a focussé sur – son poids sur ses difficultés à l’école, sur son TDH non médicamenté. Je consulte pas pour ça, loin de là. Donc pour la suite, j’ai encore aucune idée où je m’en vais. Je sais plus à quelle porte cogner, pis c’est pas normal que le proche aidant doive faire ça. Le système devrait m’orienter vers la bonne ressource et devrait – on devrait pouvoir justement parler à quelqu’un, là, entre – OK, le neurologue m’a dit, bon ben, va là, fais ça. OK. Mais entre-temps si j’ai une question, qui répond à mes questions.
Google, c’est pas notre bon ami. C’est pas un bon ami. Donc je pense que c’est là beaucoup. On a parlé d’éducation, là, de prévention. Oui, ça fait partie de la solution mais justement il faut avoir les ressources pour pouvoir aller là.
Moderator: Vous avez, pis sincèrement, je souhaite que les choses s’arrangent le plus vite possible. Je pense personne ne devrait se retrouver dans une situation comme celle-là qui est difficile. Vous avez quand même identifié des pistes de solutions, c’est-à-dire des choses qui auraient pu changer votre itinéraire dans le système. Vous avez parlé de l’accès aux soins, de la flexibilité du système, de la flexibilité de l’accès, par exemple, aux ressources pour la perte d’autonomie.
Mais également la valorisation, là, du rôle des proches aidants. Alors je pense que c’est – ça reste, comme je vous disais, à mon avis, justement le rôle des patients, les rôles des usagers est important pis c’est – pour identifier des pistes de solutions comme celles-là, parce que vous y êtes confrontée. En tout cas, merci beaucoup pour votre témoignage, Madame Lambert, en espérant que les choses se règlent le plus rapidement possible pour votre garçon.
Édith Lambert: Merci.
Moderator: Alors, je vous proposerais qu’on enchaîne avec monsieur, Dr Abso Shabah. J’ai fait tout à l’heure la présentation de Dr Shabah qui lui a le défi de parler de justement de transition vers l’innovation, de quelle façon est-ce qu’on peut parler d’innovation, améliorer les choses. Docteur Shabah, je crois que vous avez aussi une présentation. À vous maintenant la parole.
Abdo Shabah: Merci infiniment pour cette opportunité et merci pour cette expérience très touchante que vous avez partagée. Ça nous rend toujours humbles de voir jusqu’à quel point qu’il peut y avoir des défis malgré tout ce qu’on aspire pour notre système de santé. Je suis urgentologue donc j’en vois des patients de cette sorte-là. Je suis également porte-parole de l’Association médicale canadienne et j’ai eu la chance de travailler au sein du Commissaire de la santé au bien-être, de même de gérer quelques institutions, notamment sous le leadership de Dre Opatrny brièvement il y a quelques années.
Et votre expérience au niveau des soins de neurologie, la performance du système de santé, les différentes perspectives d’amélioration qu’on peut amener au niveau organisationnel, c’est quelque chose qui est extrêmement important et je vais essayer d’illustrer très humblement, brièvement tout le sens à travers. C’est une courte présentation sur les différents aspects de diffusion de l’innovation. On a parlé d’innovation comment est-ce qu’on peut intégrer ça et on a été chanceux de pouvoir intégrer une innovation dans une période très difficile qui était post-pandémie après la première vague.
Donc, de mon côté, bon, mon intérêt pour l’innovation a commencé il y a plus d’une dizaine d’années. Voici une photo de 2010 lorsque j’étais déployé avec la Croix-Rouge canadienne pour monter un hôpital de campagne. On l’a monté en 36 heures. Voici notre première patiente qu’on a reçue avec sa proche aidante, sa maman qui était là et qu’on a pu traiter.
Et malgré que ce sont des innovations, on va dire, organisationnelles qui arrivent, qui ont été déployées dans les pays en voie de développement mais que ça soit dans les chaleurs du sud, on a eu malheureusement, nous, notre expérience ici au Canada après-pandémie des déploiements de ces hôpitaux, des installations temporaires. Donc, ces innovations organisationnelles nous suivent et peuvent être inspirées de n’importe quelles circonstances.
Et aujourd’hui ce qu’on a après plusieurs vagues de pandémie, notre système est encore affecté et les délais associés par le délestage aujourd’hui rendent ça tellement difficile pour les utilisateurs et les professionnels qui y travaillent. L’accès aux soins est plus critique que jamais et l’expérience patient dont vous avez fait part, Madame Lambert, est de plus en plus difficile. Et avec les temps d’attente qui se prolongent et ça prend de plus en plus d’importance.
Et si par ces moments difficiles on se dit, on donne des soins de qualité, la confiance des patients dans le système de santé je vois de plus en plus certains patients exprimer comment que leur confiance est un peu ébranlée surtout quand ils rencontrent des situations dans lesquelles les soins ne sont pas nécessairement très adaptés par rapport à leur expérience. Ils réclament de plus en plus des services très personnalisés et adaptés à leurs besoins, à leur contexte.
Et on sait que la médecine, ben, ça devient – la médecine est complexe, très spécialisée, et le personnel de son côté a cette lourde tâche de livrer la meilleure qualité de soins, la meilleure expérience patient optimale avec des ressources qui sont de plus en plus limitées avec des équipes malheureusement de plus en plus épuisées. Et lorsqu’on sait que la médecine a évolué au fil du temps, comment est-ce qu’on donne un peu les soins au début. On était sur un peu l’artisanat, donc c’est un art la médecine. On la donne. C’est du un à un. Donc on se disait, ben, la qualité et le temps ou le coût qu’on y consacre ça aide ça.
Pis quand on a organisé ça en système, on se dit, ben, est-ce qu’on peut produire des soins de masse. Donc donner vraiment ça à un plus grand nombre et a même introduit l’amélioration donc le lien (sic) au sein qui provient un peu de différents secteurs. Pis aller chercher, est-ce qu’on peut avoir une bonne qualité, un meilleur coût pour ce qu’on offre comme soins? Et aussi donner ça en temps opportun. Et au fil du temps, ben, il y a eu une évolution. On se dit, est-ce qu’on peut amener la personnalisation de masse?
Donc là, on amène le concept de flexibilité au niveau des soins. Ça va un peu à l’encontre de la standardisation parce que c’est un peu dans l’aspect quand on standardise énormément ou qu’on fait quelque chose qui est de l’artisanat, la personnalisation de masse, c’est un peu entre les deux. Et de plus en plus, on parle de la production personnalisée, donc on donne vraiment des soins qui seront au-delà de la flexibilité. On rajoute l’adaptabilité de ces soins-là et l’innovation qui doit être ajoutée dans certaines circonstances qui ne sont pas – ce ne sont pas des innovations qui peuvent être généralisées dans l’ensemble du système.
Et comment l’innovation peut nous aider à croître l’accès, améliorer la qualité des soins, à offrir un environnement de travail stimulant et réduire le coût de votre santé. Je vais vous donner – je vais vous présenter une aventure qu’on a eue au niveau de l’innovation. On prendra la pandémie et c’est la preuve qu’on peut innover et s’améliorer même en temps de crise.
Et en fait, c’était une innovation, un projet qui avait été – que j’avais débuté et qui avait été soutenu par Grand Challenge Canada pour – il y a plusieurs années dans le domaine humanitaire et qui a repris forme dans notre système ici au Québec après la seconde vague. Et c’est un vidéo un peu qui illustre ce qui a été développé. En fait, c’est de prendre certains modules, de les installer dans une salle d’urgence, de pouvoir connecter, de créer comme un environnement complètement connecté, de pouvoir amener ces dispositifs-là à géolocaliser différents soit outils, soit les intervenants, soit les patients.
De leur envoyer des messages, des informations très ciblées et de monitoriser à distance l’ensemble des opérations sur le terrain et de donner des informations clés en temps opportun pour le bon patient avec le bon clinicien au bon moment et au bon endroit. Et ç’a été, bon, une innovation. Ce qu’il fallait, c’est avoir de la simplicité, de la flexibilité. Il fallait que ça soit adaptatif donc c’était du plug and play. On l’insère dans une prise murale et normalement ça devrait fonctionner.
Et ce projet a permis une installation en quelques heures dans un hôpital sur la rive sud de Montréal. Et c’est un projet qui s’est nommé, on l’a baptisé Kronos (sic). Donc en outillant les patients. On a commencé avec les patients avec un bracelet géolocalisé. On avait la possibilité de monitoriser tous leurs déplacements et d’assurer que le bon patient reçoit au bon moment avec le bon intervenant le bon soin, donc dans un parcours vraiment bien ciblé.
Et ça, ce qu’on voit ici c’est ce qu’on avait commencé avec la COVID. Donc, ici vous voyez c’est la géolocalisation de deux, de l’intervenant et du patient. Bon évidemment, c’est un mannequin qui est simulé à l’intérieur de l’établissement de l’amener de la salle d’urgence vers les soins intensifs pour les patients COVID. En même temps vous allez voir, il y a certaines lumières qui s’allument pour dire qu’on a un trajet actuellement qui devrait être protégé.
Donc c’est la lumière rouge pis la lumière peut devenir verte par la suite. Donc c’est vraiment dans cette continuité de donner un peu des soins en temps réel et avec des notifications qui sont ciblées. Et on a choisi quelque chose, une trajectoire qui était extrêmement pertinente pour nous. Au-delà de la COVID, on s’est dit, on va cibler une trajectoire qui est bien définie. C’est la trajectoire ACV. On sait qu’au niveau ACV, c’est une maladie extrêmement importante.
En fait, au Canada on a un patient à toutes les neuf minutes qui est atteint d’ACV. Et aux États-Unis, c’est toutes les 40 secondes. Et c’est la troisième cause de mortalité. C’est la première cause d’invalidité et si on peut sauver 15 minutes dans une trajectoire de soins avant de donner par exemple la thrombolyse à un patient, on peut rajouter un mois de vie en bonne qualité de vie pour ce patient-là. Donc, chaque minute compte.
On a été vraiment vers la chronodépendance et le Ministère l’avait bien reconnu. Donc la trajectoire ACV, il y a des indicateurs de performance mais c’est différemment, on va dire traduit dans chacune des organisations. Et ce qui était important, c’est d’avoir un peu le feedback en temps réel. Est-ce qu’on est en retard de quelques minutes ou on peut – on a encore le temps? Est-ce qu’on peut accélérer le processus? Et on a pu rapidement déployer ça sur l’ensemble des étages et d’aller regarder de la salle d’urgence au moment où les paramédics l’amènent jusqu’aux soins intensifs ou à l’unité de neurologie.
Donc on a pu le déployer rapidement. On a créé un comité de gouvernance, en fait, qui implique l’ensemble des acteurs pour l’ensemble des perspectives en fonction de chacun des intérêts qui sont là en place. Et évidemment, on a utilisé les nouvelles technologies, une interface numérique, qu’on a amené la numérisation du parcours de soins. Et l’ensemble des éléments qui devaient être captés lors de ce parcours de soins là. Donc on a amené des tableaux de bord vraiment en temps réel au niveau clinique avec les indicateurs, avec l’éducation ciblée, la carte qui définit où est-ce que le patient il est.
Pis en même temps, ben, les gestionnaires, eux, de leur côté au-delà du temps réel, ils veulent avoir des données cumulées et de savoir comment est-ce que ça s’est passé au courant des derniers jours, des dernières semaines et/ou des derniers mois. Évidemment, on a inclus des patients partenaires pour valider le projet, les informer, les impliquer, et également leurs proches aidants.
Et la communication, c’est clé. Donc on a vraiment amené la communication plus informelle, donc vraiment diffuser ça au sein de l’organisation, la communication plus formelle en informant l’ensemble des gens. Et ici le projet a été couronné quand la découverte est venue pis ils ont pu capter un peu l’innovation.
Donc, comment ça se traduit? Bon, ici, très brièvement, bon, les ambulanciers vont venir. Et vous avez bien compris le message au niveau de on installe une balise et en même temps de l’autre côté, ben, les intervenants avec un appareil mobile sont capables de capter les données. Et aussitôt que le patient arrive dans une certaine zone, l’information la plus adaptée au niveau du patient est amenée et l’intervenant est capable de consulter. Et des notifications clés sont envoyées aux différents intervenants qui eux sont à distance, mais qui suivent de près ce parcours-là.
Donc en tant que médecin, si je peux me permettre une prescription pour notre système de santé en transformation, c’est vraiment de cultiver un peu l’innovation, de l’inclure comme remède pour accroître à la fois l’équité, réduire un peu les coûts et d’améliorer la performance au niveau des soins et mobiliser les équipes de travail. Et surtout d’améliorer l’expérience patient qui doit demeurer au centre de nos préoccupations.
Donc je voulais simplement partager une expérience qui est arrivée pendant la pandémie. Des innovations clés arrivent tout près de chez vous et ce qui est important c’est de pouvoir un peu les généraliser, les amener, pis essayer de créer de la valeur au niveau du système. Chaque minute compte. Chaque minute dans une salle d’urgence rajoute un peu plus d’accès pour d’autres patients qui peuvent venir consulter. Donc voilà. Merci.
Moderator: Ah ben, merci beaucoup Dr Shabah. Alors plein de belles pistes de mise en œuvre pour optimiser le fonctionnement pis améliorer le cheminement que l’on traverse quand on entre dans le système de santé. Optimiser nos ressources sans qu’il n’en coûte vraiment beaucoup plus cher. Vous avez parlé de justement de l’efficacité au niveau des coûts parce que c’est une des préoccupations bien sûr dans l’esprit de beaucoup de gens, alors que les systèmes de santé dépassent souvent la moitié des budgets des gouvernements.
Alors, il s’agit bien sûr de ressources énormes. On cherche à optimiser l’utilisation des fonds. Je vous remercie beaucoup pour vos deux interventions. Comme je vous le mentionnais d’emblée, on va avoir maintenant une période d’échange. J’ai vu qu’il y avait eu quand même de nombreuses questions qui avaient été adressées, plusieurs questions. Et nous en avions une qui était particulièrement destinée à Mme Lambert. Si vous permettez, je vais vous la lire.
Et elle évoque justement la volonté du ministre Dubé de mesurer la performance du réseau avec différents indicateurs et dont un qu’elle dit saluer qui parle de mesurer l’expérience patient ou l’expérience client. Alors un indicateur qui mesurerait l’expérience patient. « Comment, selon vous, doit-on s’y prendre pour que cet indicateur fasse sens justement pour le patient, l’usager avec votre expérience patient partenaire et proche aidante? De quelle façon devrions-nous mesurer et suivre l’expérience client pour que ça signifie quelque chose pour que ça fasse sens pour l’usager lui-même? Alors de quelle façon doit-on mesurer cet indicateur? »
Édith Lambert: Ben, je pense qu’on peut partir du principe un peu comme quand on achète quelque chose ben souvent il y a un service après-vente. On pourrait aller un peu avec un service après-soins. Donc, ça de l’air un peu absurde mais ça reste que comment savoir si ç’a bien été, si ç’a fonctionné, si le patient on va dire satisfait des soins reçus. Ou qu’est-ce – quelles embûches ils ont eues? Je pense qu’il y a pas d’autre moyen que de poser la question aux personnes concernées.
J’ai entendu un petit peu plus tôt, je pense que c’est Mme Opatrny qui disait que depuis qu’elle est en poste, il y a des gens comme moi dans tous ses comités pour entendre justement les patients, les aidants et tout. Pis que ç’a fait un gros – une grosse différence. Si je ne me trompe pas, c’est ce que vous aviez dit tantôt, là. Donc, je suis contente d’entendre ça parce que les proches aidants ils peuvent aider, ben, grandement.
On peut pas remplacer un intervenant chose que des fois on voit pis qui est triste parce que c’est pas parce qu’il y a un proche aidant ça implique qu’on peut retirer quelqu’un, un intervenant pour aller le mettre ailleurs après. Parce que le proche aidant a besoin de soutien, a besoin d’éducation lui aussi et il a besoin de répit également. Et sans le proche aidant, ben le système s’écroule encore plus.
Je parle pas juste de ma situation, là. Tantôt, j’ai vraiment focussé sur la situation qu’on vit présentement mais ça s’applique à tout le monde. Quelqu’un qui a une perte d’autonomie suite à de la chimio ou que sa famille l’encadre, il va avoir rendez-vous avec eux. Bon, pour revenir à comment je pense qu’on doit évaluer ça, vraiment je pense que c’est – que ce soit par la technologie justement, en envoyant un courriel avec un sondage avec des questions prédéterminées avec peut-être un espace où on peut nous-mêmes écrire quelque chose, de verbaliser la frustration ou le bonheur qu’on a eu.
Parce qu’il y a des endroits où j’ai juste des bons commentaires à dire dans tout ce que je vous ai raconté. Ç’avait de l’air négatif, mais il y a certains endroits que c’était positif. Donc c’est important d’avoir les deux. On cherche l’équilibre donc il faut avoir du positif, du négatif. Pis après ça, je pense que basé là-dessus on va pouvoir aller vers des objectifs qui sont réalistes et dans les attentes de la population. Pis après ça, ben, de mieux justement quantifier.
On a changé telles choses, est-ce que ça fonctionne? Ben, on va le voir avec les prochaines réponses des prochains patients qui auront eu droit à la nouvelle version de soins à ce moment-là.
Moderator: Oui, c’est ---
Lucie Opatrny: C’est loin d’absurde de ce que vous dites de post-expérience ou post-vente. C’est parce que je pense qu’on part d’assez de loin que ç’a pas été intégré à date. Puis il y a des sondages qui existent qui sont appliqués par exemple dans d’autres juridictions qui vont aller chercher ça pour voir. OK, mais en général où et comment s’améliorer. Alors, loin d’absurde je pense qu’il faut vraiment aller vers ça pour l’inclure dans nos pensées et réflexions.
Édith Lambert: Super. Je suis contente d’entendre ça.
Moderator: D’aller chercher donc une sorte de rétroaction systématique de tous les usagers qui entrent d’une manière ou d’une autre.
Édith Lambert: Mais pas juste le patient, t’sais. Justement si le proche aidant a été impliqué, ben lui aussi devrait répondre à ce sondage-là, parce que la perception va être différente.
Joanne Castonguay: Il faut souligner la richesse que ces données-là aurait si on le faisait de façon systématique. Ce serait fantastique.
Édith Lambert: Là, vous seriez en mesure de vraiment voir. T’sais, on sait qu’on manque de données. Ben, là, vous les auriez. Je pense que c’est quand même quelque chose – je m’excuse. Je croyais que c’était dans mon fil. Je pense que c’est quelque chose qui est quand même facilement applicable parce qu’on a déjà les technologies pis je veux dire un courriel – je travaille présentement au marketing par courriel. On fait ça à la journée longue. Les entreprises envoient des courriels à leurs clients. Donc je pense qu’on peut faire la même chose facilement, là, avec les soins.
Abdo Shabah: (off microphone) que le système a en région.
Édith Lambert: Oui, c’est ça, sur Google.
Moderator: En tout cas, excellente piste de réflexion. Merci beaucoup Madame Lambert. Nous aurions ici une question pour Dr Shabah. Alors, une question qui se formule comme suit. « Quelles stratégies ont été utilisées pour s’assurer de la perpétuité des nouvelles façons de faire à la fin du projet? » Alors, comment assure-t-on la pérennité d’initiatives comme celle-ci?
Abdo Shabah: Oui. C’est une excellente question. En fait, plusieurs initiatives initialement peuvent être coûteuses, mais élargies à plus grande échelle peuvent faire du sens. Et c’est là où on peut avoir des économies d’échelle. De mettre un système en place pour une seule organisation, ben, ça peut être coûteux pour l’organisation et c’est pas l’ensemble de tout le système de santé qui va en bénéficier. Mais quand on fait un peu cette expansion, c’est vraiment ce bénéfice-là se traduit de plus en plus.
Et des fois, ça se traduit autrement que par simplement des gains financiers. C’est un gain comme de satisfaction. C’est des gains en termes d’efficacité et de satisfaction au niveau du personnel. Donc il faut le mesurer de différentes façons. Mais pour la pérennisation, il faut regarder les indicateurs clés et il faut aussi s’assurer que si on arrive à ce que c’est quelque chose qui peut s’élargir à plus grande échelle pour amener un plus grand bénéfice.
Moderator: Si vous permettez, je vais vers Mme Castonguay.
Joanne Castonguay: Ben, en fait, ça m’amène à poser une question parce que pour moi, je regarde cette solution-là pis je peux pas m’empêcher de penser que pour d’autres types de soins, des soins à domicile, par exemple. Si on était capable de localiser les patients, de les monitorer et même chose avec les ressources à leur disposition, ce serait fantastique. Il me semble que ce type de technologie là serait pertinente. Est-ce que vous avez déjà été appelé à regarder si c’était pertinent ou utile ou l’utiliser dans d’autres?
Abdo Shabah: Définitivement qu’on a regardé pour des – où est-ce que ça peut s’appliquer. Il y a deux échelles de temps, soit qu’on regarde au niveau des aigus où chaque minute compte. Vous savez, si on sauve cinq minutes aux deux heures dans une salle d’urgence de 75 civières, on donne trois civières par jour de plus pour de l’accès à des patients. À la fin de l’année, c’est à peu près 1 000 civières-jour qu’on peut avoir.
Et ça, c’est au niveau hospitalier où c’est le plus coûteux. Mais quand regarde ce qui se passe au niveau de la première ligne, au niveau des soins à domicile, il y a plein d’exemples qui existent dans d’autres industries, mais aussi dans le secteur de la santé pour faire du monitoring à distance, pour faire le suivi des interventions. Il y a même des innovations qui émergent ici au Québec par rapport à ça et qui pourraient, si déployées à grande échelle, servir au moins au niveau de la satisfaction mais sinon pour la réduction des coûts.
Moderator: Le temps que nous avions pour le webinaire s’écoule plus vite que je pensais. Et il ne nous reste que 10-12 minutes et pour cette toute, toute dernière étape, tronçon avant la fin de notre webinaire, nous avons un petit défi pour vous qui est d’essayer de formuler en une ou deux phrases les idées clés les plus marquantes, selon vous, qui devraient être retenues de tous nos échanges de ce soir. Alors, évidemment dans cet esprit de créer de la valeur, s’il y avait des messages clés qui devaient être retenus au cœur des prochaines démarches à entreprendre, lesquels messages clés devraient-ils être?
Alors c’est un bon défi. Je vais vous laisser peut-être décider qui veut se lancer en premier. Alors que retenez-vous de plus important de ce que nous avons mentionné ce soir? Docteur Shabah.
Abdo Shabah: Je vais commencer. Je veux dire l’innovation c’est pas une invention. On peut innover. On peut amener des changements, des petits changements et ça peut amener un grand impact au niveau des organisations. Il faut regarder les facteurs de diffusion de ces innovations-là, de les prendre en considération. Une fois qu’on a ça, on peut par la suite les pérenniser et en bénéficier à grande échelle.
Moderator: Merci, félicitations. Madame Castonguay.
Joanne Castonguay: Moi, je dirais l’information, la circulation et la transparence sur la bonne information qui permet d’informer sur les résultats, parce qu’on voit – on a parlé, Mme Lambert nous parlait de ce qui était important pour elle. On doit absolument monitorer ces éléments-là pour nous permettre de prendre les bonnes décisions. Ça arrivait exactement avec qu’est-ce que vous disiez aussi. C’est-à-dire que si on a cette information-là que ça soit du point de vue du prestataire ou du point de vue du patient ou de son proche aidant, on arrive à prendre les meilleures décisions. Et c’est vrai aussi pour le système.
Moderator: Merci beaucoup. Donc innovation, information. Madame Opatrny.
Lucie Opatrny: Je dirais de mesurer et être transparent avec ce qu’on mesure. Pis quand je dis mesure, ça peut être des expériences patient comme ça peut être des données médicales comme autres, parce que c’est juste en sachant où nous sommes qu’on peut mettre des actions et aussi mesurer l’amélioration qu’on met en place.
Moderator: Et de dresser un portrait juste d’où on en est c’est vrai que ça nous permet de – ça va où on doit faire le prochain pas. Merci beaucoup. Madame Lambert.
Édith Lambert: Je vais répéter un peu ce qu’ils ont mentionné. Effectivement, la transparence, la flexibilité dans la standardisation justement pour dire, ben OK, on veut des critères fixes, oui, mais selon certaines situations on pourrait bifurquer pour assurer des soins de qualité pis de l’aide à tous les niveaux, à tous les âges. Et en même temps, valoriser plus le rôle des proches aidants et – ben, les mesures comme ils disent, là, à tout point que ce soit au niveau de la clientèle, des données ou – pis de mettre ça, ça va permettre de se comparer à des systèmes qui fonctionnent pis de justement aller voir. Ben eux, ça fonctionne. On va pouvoir se partager tout ça pis améliorer le système.
Lucie Opatrny: Je voulais juste clarifier que quand je dis « standardisé », je veux pas dire qu’on fait tout copie conforme. Je veux dire que les bases égales sont standardisées pour laisser le temps pour l’innovation et l’ajustement. Parce que ce volet-là est essentiel pour personnaliser et pour l’innovation. Alors, je voulais juste quand même dire que je veux pas que tout est – soit standardisé.
Joanne Castonguay: C’est important ce que vous venez de dire là.
Moderator: Pis écoutez, on vous aurait écouté encore des heures. On le sait que le sujet et les sujets que nous soulevons ce soir sont d’une haute complexité. C’est un défi de les vulgariser. Merci infiniment d’avoir été avec nous ce soir. Et c’est maintenant au professeur Jean-Louis Denis de relever le défi de faire la synthèse des synthèses et en quelques minutes de s’adresser à nous. Mais, Monsieur Denis, bienvenue.
Jean-Louis Denis: Merci. C’est bon? Oui. Tout d’abord, j’aimerais remercier pour la richesse des interventions et la diversité aussi des points de vue. Même s’ils sont à la fois complémentaires mais ils proviennent d’une expérience différente du système ou d’un point de vue différent sur le système. Je commencerais par deux considérations générales. On n’aurait pas un tel panel si on n’avait pas appris de l’expérience des systèmes publics de santé et les systèmes publics de santé nous disent, en fait, nous a appris, en fait, deux choses.
Ils ont une limite pour améliorer la santé de la population. On sait qu’il faut regarder aussi ailleurs et c’est moins le sujet de ce soir mais avec ce que Joanne appelait la santé publique avec des politiques qui nous permettent de produire de la santé et pas juste des soins. Et presque paradoxalement ces systèmes-là nous ont appris qu’ils deviennent de plus en plus importants pour les trajectoires de vie des individus qui font face à des conditions complexes ou de longue durée. Et Mme Lambert nous a donné un exemple très éloquent.
Une autre chose aussi qu’on a appris c’est qu’on a tout le temps un décalage entre ce qu’on pourrait appeler les innovations technologiques sans délimiter à ce point-là, et la capacité de renouveler nos institutions pour capitaliser sur le potentiel de ces innovations. Fait que ça, c’est le contexte dans lequel on a discuté la question de la création de valeur. Et là, ça va m’amener à faire dans les quatre prochaines minutes et demie neuf points.
Le premier point, c’était notre point de départ. C’est-à-dire il faut prendre acte de la pandémie et de se dire, oui, la pandémie nous oblige à répondre à des impératifs à court terme, mais surtout elle nous a révélé de façon encore plus dramatique les conséquences des failles ou vulnérabilités persistantes dans notre système. Il nous incite donc à amener des réponses et les panélistes nous faisaient part de différentes hypothèques et options.
La notion de valeur, on pourrait la résumer à trois peut-être qui ont été évoquées plus ou moins explicitement. La question de l’efficience et de l’efficacité souvent traduites en termes de résultats, la question de l’équité et la question de l’innovation voulant dire aussi un système de santé qui s’adapte, mais sans jamais oublier à l’arrière une équation, je dirais, à la fois fondamentale et qui nous contraint le rapport entre les coûts et les résultats. Et ça, ça me semblait animer beaucoup certaines des interventions.
Maintenant, on se dit, comment ça peut se passer tout ça. Donc une question, je dirais, de changement institutionnel. Comment on passe de la situation actuelle à un système qu’on jugerait producteur de valeur ou générateur de valeur au sens large. Là, je retiens quatre éléments des discussions.
C’est 1) pour produire de la valeur, il faut changer la façon dont on voit les choses, c’est-à-dire cette idée par exemple d’assez simple mais difficile à exécuter à grande échelle qui est de dire ce qu’on produit a une finalité. C’est une expérience patient, par exemple, positive. C’est beaucoup plus facile à dire qu’à faire mais c’est un changement, je dirais, dans notre tête de viser ça comme premier point où le service j’ai beaucoup aimé post-vente, post-expérience.
Un autre aspect, c’est développer les outils dont la standardisation avec les nuances qui ont été faites qui nous permettent de garantir de façon systématique une qualité, une sécurité des soins ou une pertinence des interventions. Le troisième, c’est des nouvelles relations. On en a parlé beaucoup. Il faut qu’il y ait des nouveaux acteurs autour de la table. Il faut mettre ensemble des nouveaux secteurs. Il faut que les gens puissent exprimer des nouvelles attentes et là que les groupes ou les personnes plus marginalisés habituellement aient voix au chapitre.
Et je dirais le quatrième c’est aussi peut-être jouer différemment avec l’autorité. Et ça, ça va m’amener à mon dernier point, c’est-à-dire on ne change pas un système sans ébranler un petit peu comment on utilise le pouvoir et l’influence qu’ont les acteurs. Et là, je terminerais là-dessus. Je dirais, on a parlé d’accélérateur mais je dirais nos accélérations ont besoin de terrains d’atterrissage. C’est toujours gênant en avion si on avait juste de l’accélération pis pas de piste d’atterrissage le moment venu.
En tout cas, moi, quand je voyage j’aime bien qu’il y en ait une. Et je dirais, il y a peut-être trois hypothèses en ce moment autour de la table et je terminerai là-dessus. Elles ont été évoquées. Un premier terrain d’atterrissage, c’est prendre enfin au sérieux qu’on ne va pas faire des progrès substantiels tant qu’on n’a pas des soins de proximité organisés. En anglais, ils disent des teams-based care qui sont réactifs, accessibles 24 heures, qui sont un point de contact, qui peuvent filtrer la demande.
Mais non seulement la filtrer mais aussi la retenir et y répondre au mieux. Donc ça, c’est extrêmement important. Et ces structures-là doivent être imputables aussi et être équipées, avoir les capacités, première chose. Deuxième chose, je vais le dire vite. Je pense qu’un partenariat renouvelé avec la profession médicale, ça s’adresse pas à l’engagement au commitment des individus médecins, mais un partenariat renouvelé avec la profession médicale qui dépasse sur le plan institutionnel ce qui se discute à la table de négociation. Ce serait une de nos grandes innovations institutionnelles.
Et un troisième point pour l’équité. Je vous promets que j’arrête. Je sais que le temps n’est pas infini. Un troisième point sur l’équité. C’est on doit penser à des partenariats ambitieux avec les groupes dits plus marginalisés. Il y a des exemples dont au Canada l’Alliance canadienne pour terminer l’itinérance est un exemple. Et on doit avoir des partenariats avec ces groupes-là où à la fois les financeurs et à la fois les groupes visés sont mutuellement imputables d’objectifs de résultats et des fonds qu’ils vont recevoir.
Mais tant qu’on ne va pas sur des projets plus ambitieux à ce niveau-là, la question d’agir auprès des iniquités va être plus un vœu qu’une réalisation. Je terminerais là. Il y aurait beaucoup de choses à dire. Ressources humaines, c’est un chantier qu’on ne peut aborder mais qui est à considérer entièrement mais ce que je dirais en conclusion c’est on sait qu’on a des pénuries de main-d’œuvre clairement et de la pression excessive sur ceux qui travaillent dans le système.
On ne sait peut-être pas encore la teneur de ça tant qu’on n’a pas fait un travail pour renouveler la manière dont on fait, on s’organise et c’était le message de Dr Shabah aussi. Je vous remercie.
Moderator: Merci à vous, professeur Jean-Louis Denis. Pas facile de faire cette synthèse sur justement les différentes dimensions des enjeux. Pis je me sens particulièrement interpellé sur la question de justement l’intégration des groupes marginalisés à titre, évidemment, spécialiste des questions autochtones au Canada. Je suis tout particulièrement touché par ces enjeux-là. Et je pense sincèrement que les groupes marginalisés ont aussi des réponses innovantes à apporter si on les interpelle.
Alors, dans cette idée d’intelligence collective, faisons en sorte que tout le monde participe aux pistes de solutions. Merci à l’ensemble de nos panélistes, Mme Joanne Castonguay, Dre Lucie Opatrny, Mme Édith Lambert et Abdo, Dr Abdo Shabah. Merci d’avoir été avec nous. Merci également au H-pod pour l’organisation du webinaire de ce soir. Je tiens aussi à vous souligner que si jamais vous souhaitez écouter à nouveau le webinaire, il sera disponible en ligne sur le site du H-pod, mais également un rapport synthèse normalement s’en vient.
Bonne chance aux rédacteurs pour résumer les propos qui auront été tenus ce soir. Et à mon tour maintenant de vous remercier d’avoir été avec nous, d’avoir participé, d’avoir été nombreux à poser vos questions, à formuler des commentaires dans la fenêtre de conversation. Mon nom est Alexandre Bacon. Ç’a été un plaisir de partager cette heure et demie avec vous. Portez-vous bien et à la prochaine. Merci.